Si la pandémie de coronavirus semble derrière nous, toute la lumière autour des vaccins n’a pas été faite. En Allemagne, une enquête jette encore un peu plus l’opprobre sur les Big Pharma.
Tollé en Allemagne : Pfizer et Moderna ont fait exploser le prix de leur vaccin au beau milieu de la pandémie
Pourquoi est-ce important ?
Durant la pandémie, de nombreuses critiques ont été émises à l'encontre du manque de transparence entourant les contrats passés entre les grandes firmes pharmaceutiques et les pays européens pour les vaccins anti-Covid. Alors que le Parquet européen mène une enquête qui pourrait mouiller Ursula von der Leyen, des médias allemands font des révélations pour le moins dérangeantes.Dans l’actu : Pfizer et Moderna ont gonflé leurs prix.
- Dans une enquête commune, les médias allemands NDR, WDR et SZ ont révélé que Pfizer et Moderna avaient augmenté de 50% (voire plus) le prix des vaccins anti-Covid qu’ils ont vendus au gouvernement allemand.
- Les principaux intéressés bottent en touche.
Le détail : près de 30 euros la dose.
- D’après l’enquête, en décembre 2020, l’Allemagne a commandé près de 39 millions de doses de vaccin à Pfizer et BioNTech, à 15,50 euros la dose.
- Neuf mois plus tard, lors d’une commande de 168 millions de doses, Pfizer et BioNTech ont fait passer leur prix à 23,20 euros la dose.
- De son côté, Moderna a d’abord vendu son vaccin anti-Covid à 19,50 euros la dose.
- Trois mois plus tard, la firme pharmaceutique américaine a fait payer 29,70 euros la dose à Berlin.
- Comme il s’il s’agit d’un secret industriel, on ne connaît pas avec exactitude le coût de production d’une dose de vaccin anti-Covid. Toutefois, une étude de l’Imperial College de Londres l’a estimé entre 0,50 et 1,85€.
- Un prix qui ne comprend toutefois pas la recherche et le développement, les essais cliniques, la distribution, la propriété intellectuelle ou les frais juridiques.
- « Ne vous fiez pas à des informations qui ne peuvent pas être vérifiées », ont réagi Pfizer et BioNTech.
- Les chiffres ont pourtant été confirmés par le ministère allemand de la Santé, avancent les journaux allemands.
- Moderna a refusé de commenter le dossier.
Scandaleux ou non ?
Les explications : pas si cher, mais…
- Pour le président de la « Commission des médicaments » de l’Association Médicale Allemande, Wolf-Diete Ludwig, les prix augmentés ne sont pas si élevés. Ils sont comparables à ceux des vaccins anti-grippe, a-t-il expliqué.
- En outre, du côté de l’industrie pharmaceutique, on souligne le fait que BioNTech a longtemps dépensé plus d’argent qu’elle n’en gagnait en se consacrant à la recherche de nouveaux médicaments et vaccins. Et que l’argent récolté suite à la pandémie sert avant tout à la recherche.
- En revanche, le fait d’avoir fait grimper les prix en pleine pandémie dérange le Dr Ludwig.
- « Pour moi, c’est douteux car, en regardant les revenus des ventes, ils auraient pu s’en tenir au prix d’origine », estime-t-il.
- Mais étant donné que l’Allemagne avait cruellement besoin de vaccins, les firmes en ont profité, et le gouvernement a cédé.
- De vives critiques ont également été émises par le député (et médecin) chrétien-démocrate (CSU) Stephan Pilsinger.
- « Si c’est vrai, alors je pense que c’est complètement injustifié. Le gouvernement fédéral n’aurait pas dû s’impliquer dans de telles transactions », a-t-il déploré.
- Le ministre allemand de la Santé de l’époque était Jens Spahn, membre du parti frère de la CSU, la CDU.
- Durant son mandat, l’Allemagne a commandé 556 millions de doses de vaccin anti-Covid. En y ajoutant les commandes passées sous son successeur (Karl Lauterbach, SPD), on arrive à un total de 672 millions de doses. Soit… huit doses par habitant.
- Des pourparlers sont en cours pour réduire ces commandes, mais il est d’ores et déjà certain qu’une partie des doses devront être détruites, a fait savoir le ministère de la Santé.
Le contexte : obscur.
- Tant la Commission européenne que les sociétés pharmaceutiques tentent de cacher les détails des contrats qu’elles ont passés autour des vaccins anti-Covid ces dernières années.
- Comme nous vous l’expliquions il y a deux semaines, Ursula von der Leyen risque d’être appelée à venir s’expliquer devant le Parlement européen sur ces procédures aussi opaques qu’étranges. Elle est notamment impliquée dans ladite « affaire des SMS », qui concerne ses échanges privés avec le patron de Pfizer, Albert Bourla.
- Invité à deux reprises par le Parlement, ce même Bourla a refusé de s’expliquer. Cela pourrait valoir aux lobbyistes de Pfizer d’être bientôt exclus de l’institution européenne.
- Pendant ce temps, le bureau du procureur général européen (EPPO) mène une enquête depuis déjà quelques mois au sujet de « l’acquisition des vaccins anti-Covid dans l’UE ». On n’en sait pour l’instant pas beaucoup plus… mais cela pourrait concerner von der Leyen.