Le nombre de climatiseurs explose à l’échelle planétaire, et la consommation d’énergie spécialement dédiée à oublier la chaleur grâce à cet air conditionné suit le même chemin. Une véritable fuite en avant.
L’air conditionné, un luxe devenu besoin vital dans de nombreux pays : 20% de toute l’électricité consommée à l’échelle mondiale, et ça devrait fortement augmenter
Pourquoi est-ce important ?
L'air conditionné a conquis le monde en quelques années. Rare encore il y a 10 ou 15 ans sous nos latitudes, il est devenu difficile de s'en passer en voiture ou dans les magasins, l'été. Et c'est un usage sans commune mesure avec celui qui a le vent en poupe dans les pays chauds. Avec à la clef un coût énergétique hallucinant.Si vous ne pouvez pas passer un été belge sans climatisation, vous n’êtes certainement pas prêts pour des vacances en Inde. Dans ce pays, le plus peuplé du monde depuis cette année, ce qui était auparavant un luxe devient rapidement un besoin vital pour l’ensemble de la population.
Un air conditionné qui devient vital
- Entre 8 % et 10 % des 300 millions de foyers du pays possèdent un climatiseur à domicile, rapporte The Guardian. Un investissement encore coûteux pour de nombreux Indiens, mais ce nombre devrait atteindre près de 50 % d’ici 2037, selon les projections gouvernementales.
- Bien plus inquiétant encore : selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le pays comptera pas moins d’un milliard de climatiseurs en fonctionnement d’ici 2050, en comptant les domiciles comme les lieux publics comme les magasins. Car pour beaucoup d’habitants du pays, ça sera devenu une nécessité vitale, face au réchauffement climatique.
« Traditionnellement, la climatisation était considérée comme un produit de luxe, mais ce n’est plus le cas. Elle est perçue comme une nécessité pour survivre. À la manière dont le marché se développe, il se pourrait que 100 % des foyers possèdent un climatiseur d’ici 2050. »
Vaibhav Chaturvedi, chercheur au conseil pour l’énergie, l’environnement et l’eau, un groupe de réflexion à Delhi,, cité par The Guardian
La fraicheur, un marqueur social
Un constat qui ne fait toutefois pas l’unanimité, car l’air conditionné reste cher pour de nombreux Indiens. Dans un pays frappé par les inégalités, cela pourrait bien devenir un marqueur de différence sociale particulièrement éloquent. Un constat qu’on peut d’ailleurs faire pour la majorité du monde subtropical. L’Amérique du Sud traverse son printemps le plus chaud depuis longtemps, et l’Asie du Sud-Est subit des canicules de plus en plus régulières. Pour ces pays où le niveau de vie moyen a augmenté rapidement, l’air conditionné séduit. Avec la hausse drastique de la consommation énergétique qu’il provoque inévitablement.
- À l’échelle mondiale, le nombre de climatiseurs a augmenté pour atteindre plus de 2 milliards en 2023, relève encore le quotidien britannique.
- Ça en fait un pour un peu moins de quatre terriens. Pour ne pas dire un par foyer, en schématisant beaucoup. Même si dans les faits, la couverture dépendra beaucoup d’un pays à l’autre. Mais ce sont les pays tropicaux qui voient la croissance la plus rapide.
- Et ça consomme, toute cette soufflerie d’air froid. Plus de 20 % de toute l’électricité mondiale est déjà utilisée par des ventilateurs ou des climatiseurs. Ça va vraisemblablement s’aggraver.
- Et la consommation d’énergie de ces machines à courant d’air n’est pas notre seul problème. Les climatiseurs sont aussi très peu efficaces, génèrent de la chaleur pour produire du froid – et doivent par conséquent parfois être eux-mêmes refroidis – et ils sont bourrés de produits chimiques. Certains bien plus terrifiants pour l’effet de serre que le CO2.
Un enjeu à la COP28
La climatisation croissante pour rafraichir un monde de plus en plus chaud tient de la fuite en avant. Durant laquelle les plus pauvres seront les premiers abandonnés sur le bas-côté. À tel point que cet enjeu s’est invité, parmi tant d’autres, à la COP28 qui se tient en ce moment à Dubaï.
Certaines des plus grandes économies défendent une politique de sobriété par rapport à la climatisation. Plus de 50 signataires se sont engagés à réduire leurs émissions dues spécifiquement au refroidissement de 68 % d’ici 2050.