Les trous noirs nous fascinent. Ces géants de l’espace, puits de gravité ultimes, sont à la fois colossaux et particulièrement difficiles à observer. Or, une nouvelle étude confirme que leur pouvoir d’attraction est si fort qu’ils sont bel et bien capables de distordre la structure de l’espace et du temps.
Un trou noir supermassif au centre de notre galaxie…
Cour de physique : l’espace-temps est une représentation mathématique de l’espace et du temps comme deux notions inséparables et s’influençant l’une l’autre. Et c’est une vue de l’esprit, car on peut aussi les considérer comme les deux facettes d’une même pièce. C’est une représentation quadridimensionnelle, qui permet de visualiser sur un même plan le temps unidimensionnel et l’espace tridimensionnel, et sur lequel les objets ont un impact, proportionnel à leur masse.
- Or, difficile de concevoir plus massif qu’un trou noir. C’est un objet céleste si compact que l’intensité de son champ gravitationnel empêche toute forme de matière ou de rayonnement de s’en échapper.
- Même la lumière, d’où son nom. C’est autant un puits de gravité extrême que de noirceur totale, ce qui le rend très difficile à observer.
L’actualité : une équipe de physiciens a braqué l’observatoire à rayons X Chandra de la NASA sur Sagittarius A* (* pour « étoile »), le trou noir supermassif d’environ 4,152 millions de masses solaires situé au centre de notre galaxie.
… Qui tourne et perturbe l’espace-temps
- Les chercheurs ont ainsi confirmé que le trou noir tourne sur lui-même, en examinant les ondes radio et les émissions de rayons X que l’on peut trouver dans le matériel et les gaz qui tournent autour de l’objet céleste.
- Or, cette rotation s’accompagne d’un effet Lense-Thirring : selon ce principe lié à la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein, autour d’un corps assez massif pour déformer l’espace-temps, l’orbite d’un satellite autour d’un tel corps massif ne suit pas exactement la même trajectoire à chaque révolution, mais se déplace légèrement. Une théorie de facto confirmée par l’observation.
« Nous avons l’habitude de penser et de vivre dans un monde où toutes les dimensions spatiales sont équivalentes — la distance jusqu’au plafond et la distance jusqu’au mur et la distance jusqu’au sol… elles sont toutes linéaires, ce n’est pas comme si l’une était totalement écrasée par rapport aux autres. Mais si vous avez un trou noir qui tourne rapidement, l’espace-temps autour de lui n’est pas symétrique — le trou noir en rotation entraîne tout l’espace-temps avec lui… il écrase l’espace-temps, et il ressemble un peu à un ballon de football. »
Ruth Daly, professeure de physique à l’Université de Penn State, citée par CNN.
Encore un point pour la théorie de la relativité d’Einstein
Qu’est-ce que ça change ? Pour nous, rien. On n’avait pas prévu d’aller voir de près comment ça se passe autour d’un trou noir. Ça n’est pas non plus un sujet de préoccupation pour notre planète, Sagittarius A* se trouvant à 26.000 années-lumière de notre planète.
- Mais c’est une découverte qui confirme la validité des modèles théoriques imaginés par Einstein. Et « C’est un merveilleux outil pour comprendre le rôle que les trous noirs jouent dans la formation et l’évolution des galaxies », ajoute Ruth Daly.
- Ça n’est bien sûr que le début : la confirmation de la rotation des trous noirs et l’estimation de la vitesse de celle-ci par les rayons X nous offrent tout un champ d’études. De là à imaginer comme possibles les anomalies physiques les plus étranges de l’espace-temps, comme les trous de ver, il n’y a qu’un pas. Celui entre la science-fiction et la science.